jeudi 14 janvier 2016

Personne ne te sauvera


Quatrième de couverture : "Qui êtes-vous ? répétai-je. Je sens quelque chose chez vous."
Il rit.
"Du talent ?
- Quelque chose de vrai et de grave, insistai-je. Vous jouez au vampire et vous y jouez très mal afin d'être sûr que personne ne vous croie.
Mais moi, je vous crois.
- Attends une minute. Tu penses que je suis un vrai vampire ?
- Pourquoi pas ?"

Manon découvre qu'une veine dans son cerveau peut lui faire perdre la vie à tout moment. Désemparée, elle s'enfuit à Las Vegas où elle rencontre Dorian, jeune acteur d'un one-man-show qui raconte sa vie de vampire. Quoi de plus attirant pour Manon que la possibilité d'une vie éternelle ?

Déjà lu du même auteur : Enquête sur les vampires ; Bal de Givre à New-York

Le livre commence ainsi : "L'été est là, il fait nuit, et Paris est enveloppé d'une brise tiède. Sur la pelouse du Champs-de-Mars, de petits groupes se sont formés, qui rient et chantent dans la pénombre. Derrière un bosquet, des notes de flamenco se détachent, tendres, sucrées."

Mon avis : Je dois l'avouer, juste en regardant la couverture, ce livre ne donne pas envie. Le résumé m'a un peu interpellé mais... Encore une histoire de vampire ? Seriously ?
Du coup, j'ai plus lu ce livre pour faire baisser ma PAL. Et en général, c'est parfois en démarrant des livres qui nous font moyennement envie qu'on découvre des perles, et ce livre en est une.
Il n'est pas parfait, bien sûr. Je ne pense pas qu'il plaira à tout le monde car, à mon sens, il aurait mérité plus de pages. Il n'a pas été assez exploité, parfois les scènes se suivent et ne se ressemblent pas. Tout ça est un peu trop survolé. Mais en même temps, je pense que c'est fait exprès. Si le livre avait été plus long, peut-être m'aurait-il moins plu, peut-être n'aurait-il pas été à l'image de ce que l'auteur voulait faire passer comme message.
Le bon côté de son nombre de pages, c'est que si j'avais été en week-end, je l'aurai certainement lu d'une traite. Là, il m'a duré trois jours car c'était en semaine.
Si je dois donner LA qualité du livre, ce qui en ressort le plus, c'est le style de l'auteur. Une écriture toute en subtilité, en finesse. Je n'avais jamais autant relevé de citations en aussi peu de pages.
Certes, il n'y a pas énormément d'action. Certes, il ne ravira pas tout le monde. Mais il vaut le coup d'oeil. Pour moi, c'est un livre à part.

J'ai eu l'impression d'enfin lire un livre, où l'auteur prend au sérieux le mythe du vampire. Qu'il a réussi à capter leur essence même. L'auteur a voulu délivrer plusieurs message, et je crois les avoir compris.
Quand on a lu des Twilight ou des Le Journal d'un vampire, on peut avoir peur d'ouvrir un roman qui traite du Vampire.
Mais là, je dirais plus que ce livre s'engage dans la voie de Dracula de Bram Stoker, ou d'Entretien avec un Vampire d'Anne Rice.
Cette nouvelle est un voyage initiatique et, très vite, ce n'est plus l'héroïne qui m'a intéressé, mais Dorian. J'ai bu ses paroles, j'ai été subjuguée comme Manon pouvait l'être.
D'ailleurs, c'est peut-être pour cela que j'ai été un peu frustrée à la fin. J'aurai aimée en savoir plus sur Dorian.


Mon ressenti sur certains passages :

"Quand j'ai repris mes esprits, j'étais assise sur le siège passager d'une voiture que je ne connaissais pas et la ville disparaissait dans le rétroviseur. Une musique mélancolique sortait des enceintes.
Dorian a agité une pochette de CD sous mes yeux. La leçon de piano, bande originale. "Le propriétaire avait bon goût.", a-t-il conclu en riant."


Cela m'a fait sourire, c'est subtil, c'est fin.

"Il est difficile de se représenter à quoi ressemble le temps pour un vampire. Il faut imaginer un sablier bouché, secoué sans cesse, une horloge aux aiguilles grippées ou tournant à l'envers. L'ancien et le nouveau se mêlent constamment. Pas d'avant, pas d'après. Jamais je n'aurai pensé cela de mon vivant, mais la mort est ce qui donne un sens aux choses. Tu saisis ?"


Ce passage est tellement criant de vérité. Tout comme travailler nous fait apprécier le repos. Tout comme la pluie nous fait apprécier le soleil. Tout comme il ne peut y avoir de bien sans le mal. La vie n'aurait pas de sens sans le temps. La vie n'aurait aucun sens, sans la mort.

Citations :

"Rimbaud sans le génie, Kerouac sans la folie -, semblable à tous ceux qui, un beau jour, se mettent à courir sans se retourner, abandonnant, grisés, les vestiges de la normalité. Le bonheur de la fuite, la jouissance de l'interdit, j'avais connu tout ça."

"Je lui ai demandé comment étaient les choses, à son avis. Vouées à la mort et à la finitude - telle a été sa réponse. Les choses, les gens, le monde.

Je n'ai pu retenir un haussement d'épaules. "Sauf que vous, vous ne mourrez pas." Il a fait une halte et a pris un air soucieux, doigt sur les lèvres. "Tu te trompes, jeune fille. Je mourrai plus tard que d'autres, d'accord. Mais je mourrai, c'est une certitude. Comme toi, comme n'importe qui. Tout est une question d'échelle. " Il a désigné le soleil couchant avant de balayer l'horizon. "Tu crois que ce monde est amené à vivre éternellement ? Je te pensais plus lucide.""

"Il arrive à Dorian de rire tout seul : des rires qui ressemblent à des sanglots. Il ne guette pas mes réactions, il s'en garde. Peut-être que je lui rappelle ce que c'est que d'être humain."

"Dans le ciel tiède, des nuages mauves passaient, fatigués, des œuvres d'art éphémères."

"J'aurai pu tomber amoureuse, peut-être,comme dans l'un de ces films imbéciles, la jeune fascinée et le grand ténébreux, j'aurai pu me laisser prendre au piège si je n'avais senti, avec une triste certitude, que l'amour n'existait pas, ou plus, à ses yeux."

"Nous parlions d'ail, l'autre jour. Nous parlions de balles d'argent et de jugement divin. Comique, non ? Mais écoute-moi, écoute-moi attentivement : notre pire ennemi, c'est l'homme que nous avons été un jour, l'innocence que nous avons perdue. Les sentiments sont notre malédiction. Ils nous mettent en danger de mort."

"Toi et moi avons commis une erreur mais c'était une belle erreur et, pour être honnête, je ne regrette rien."

"Vivre, c'est partir, m'avait confié Dorian un jour. Pour obtenir une chose, il faut renoncer à une autre."

"Il se jouait de moi, il se jouait des autres, et je souffrais tel un damné. Cent fois je lui fis jurer que j'étais le seul, que j'allais le devenir. Il se prêtait au jeu de si bonne grâce que je ne parvenais pas à décider ce qui, de la candeur ou de la perversité, l'emportait chez lui."

"C'est la brièveté de l'existence qui lui confère son incomparable éclat, c'est sa finitude qui la rend si belle, l'espoir d'un ailleurs, l'espoir d'un monde sans temps qui nous permet de supporter les épreuves qu'elle nous inflige."


Note :


15/20
Enfin un livre intelligent sur le Vampire. Un voyage initiatique qui fait passer un vrai message, qu'il n'y aurait pas de vie, sans la mort. Le style de l'auteur est sublime.
Seul bémol, peut-être un trop court, un peu trop survolé. Il ne plaira pas à tout le monde, mais pour moi, c'est une petite perle.



Lecture Commune avec Elixir de Livres


4 commentaires:

  1. Comme toi, je l'avais trouvé un peu trop court et survolé mais ça a été une bonne lecture quand même. Par contre, j'ai la première couverture, de 2012, qui est bien différente (^-^)

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    1. J'ai vu la couverture sur ton blog et c'est vrai qu'elle est différente !
      Merci pour ton passage ^^

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  2. Je ne suis pas sur que ce livre me plaise mais tu as réussi à faire une très belle chronique.

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    1. C'est très gentil je te remercie :) je t'avoue que de moi même je n'y aurai pas été mais j'essaie de baisser ma PAL en ce moment. Et finalement c'est une jolie surprise donc tant mieux ^^

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